Appel à contribution : Les personnages de l'ombre (Revue Pagaille N°2) "Mais que serait Sherlock Holmes sans Mrs Hudson ?"

 

Intercripol a le plaisir de relayer l'appel à enquêtes ci-dessous, émanant de l'un de nos nouveaux partenaires, la jeune revue Pagaille.

 

Confiant(e)s dans la capacité de nos brigades à faire justice à ces personnages que l'œuvre délaisse, et qui parfois même disparaissent sans même que l'auteur daigne le relever,  nous invitons tous nos membres à proposer, avant la date limite du 18 Juin 2021 (jour on ne peut plus adapté pour un appel), une contribution à ce dossier.

 

Parce que nous savons bien que les pires criminel(le)s ont tout intérêt à passer inaperçu(e)s, voire, comme l'a récemment suggéré Uri Eisenzweig à propos de La Venus d'Illeà n'être même pas mentionné(e)s dans l'œuvre.  

 

Si les lecteurs de Conan Doyle ont déjà pu se demander ce que ferait le célèbre détective sans le docteur Watson, combien se sont préoccupés de Mrs Hudson ? Combien se sont demandé pourquoi Sherlock Holmes bénéficiait d’un logement bon marché chez elle, pourquoi la logeuse s’occupait de lui comme d’un enfant gâté, supportant tous les importuns qui se pressent à la porte de son locataire excentrique, capricieux, hyperactif, drogué, puéril et bruyant ? 

 

Que nous apprennent des personnages comme Mrs Hudson, ces êtres souvent invisibles et muets, écrasés par les puissances géniales des personnages principaux ? Il ne s’agit pas seulement de s’intéresser ici aux personnages dits secondaires mais de remonter plus loin dans le degré d’insignifiance. Jusqu’à ces petits personnages qui constituent plutôt une sorte de toile de fond à l’intrigue, travaillent dans l’ombre, apparaissent pour disparaître aussitôt, alors même qu’ils peuvent parfois jouer le rôle d’éminences grises. 

 

Les propositions d’articles pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants, en adoptant une perspective comparatiste : 

 

  • Perspectives intermédiales : les articles visant à s’intéresser à des tableaux, à des films, à des séries, à des bandes dessinées, etc. seront les bienvenus. On aura d’ailleurs noté que ces dernières années, se sont multipliés des produits culturels, romans, films et séries en particulier, qui ont justement choisi de mettre au premier plan celles et ceux qui naguère n’avaient aucune présence scénique ni voix au chapitre (on peut penser à la série Downton Abbey ou plus récemment au film Parasite). Mais ce passage de l’ombre à la lumière est-il pour autant valorisant ? Participe-t-il à réinventer les rapports de domination ou simplement à les illustrer voire à les renforcer ?
  • Travailleurs et travailleuses de l’ombre : domestiques, mères au foyer, personnages de l’ombre dans l’espace domestique, ces personnages à qui l’on confie toute la « charge mentale » du quotidien pendant que le sublime se déploie dans l’intrigue principale. La littérature romantique en particulier présente un grand nombre de génies créateurs masculins déléguant tout le prosaïque de leur existence à de petites mains, souvent féminines (les soeurs de Joseph Berglinger chez Wackenroder, la femme de Gambara chez Balzac, etc.)
  • « Lectures en contrepoint » : dans une perspective critique sur la colonisation et l’impérialisme, les articles peuvent envisager les personnages de l’ombre à partir de cette notion d’Edward Said, qui propose de « lire les grands chefs-d’œuvre littéraires […] en nous efforçant de mettre au jour, d’élargir, de faire parler ce qui dans ces œuvres est muet, marginal ou représenté de façon idéologique » (Said, p. 275).
  • Enfants : quels petits rôles et petites fonctions sont confiés aux infans, aux muets, et comment acquièrent-ils progressivement une parole propre et une place de plus en plus centrale dans la littérature, notamment après la démocratisation de l’enseignement dans la seconde moitié du XIXe siècle?
  • Types et archétypes : quelles sont les limites de ces approches pour les personnages de l’ombre ? Aussi bien dans le théâtre que dans le roman, comment peut-on apporter un nouvel éclairage sur des rôles d’adjuvants qui ne sont habituellement envisagés que comme des types (par exemple, Frosine dans L’Avare) ?
  • Paralittérature/« sous-genres » : s’il mettent en lumière de nombreux personnages de l’ombre, le roman policier, le film noir et les romans et films d’horreur fonctionnent aussi sur tout un ensemble de personnages qui auraient pour seule fonction de participer à la mise en place d’une atmosphère anxiogène mais sont pourtant essentiels à l’intrigue et/ou porteurs d’une symbolique forte (le sans-abri dans Mulholland Drive, par exemple).
  • Animal studies : des articles visant à s’intéresser à la présence et au rôle joué par des animaux auront toute leur place dans cette réflexion - le chien Toby n’est-il pas celui qui résout finalement l’énigme du Signe des quatre à la place de Sherlock Holmes ?

 

Modalités de soumission :

  • Les propositions d’articles, de 500 mots maximum, accompagnées d’une bio-bibliographie et de 5 mots-clés, sont à envoyer avant le 18 juin 2021 à l’adresse mail suivante : revue.pagaille@gmail.com.
  • Les notifications aux auteurs seront envoyées à partir de la fin du mois de juillet 2021.
  • L’article (de 30 000 à 40 000 signes espaces compris) sera à envoyer avant le 31 octobre 2021 pour évaluation en double aveugle par le comité scientifique.
  • La publication du numéro est prévue en juin 2022 sur le site de la revue : http://revue-pagaille.fr.
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